04/12/2016 prédication Jean Pierre Pairou

 Prédication du 4 décembre 2016

2e dimanche de l'Avent


Esaïe 11, 1 à 10

Mt 3, 1 à 12

 

Texte d’ « Avent » dans le sens de l’ « avènement », bien sûr, bien qu’étant situé après la naissance de Jésus. Il est situé après la fuite en Egypte et surtout le «  massacre des innocents » soigneusement évité pour ne pas gâcher nos fêtes. L’ « avènement » se produit en réalité dans les massacres et l’exil. Le texte cependant a l’avantage de nous resituer dans une attente puisque lui-même est situé après la naissance de Jésus. .

Le personnage central est celui de Jean-baptiste  Qu’il convient de resituer à la fois dans son environnement et son message.

Jean, nous dit le texte, est au désert. Désert relatif puisqu’y coule un fleuve et que la foule s’y précipite. Ce pendant dans la Bible, le « désert » a un rôle symbolique important. Lieu de fuite, il est aussi lieu de rencontre avec Dieu. C’est l’endroit où rien ne nous distrait de nous-mêmes et où le face à face avec soit peut conduire à un face à face avec Dieu. ( Cf. traversée du désert, Moïse au Sinaï, Jésus au désert ). Le désert est chemin vers la liberté.

Cf. Eric-Emmanuel Schmitt. « Je suis entré au Sahara incroyant et j’en suis sorti croyant ». « Quand la nuit et le froid sont tombés , comme je n’avais rien, je me suis enfoui dans le sable , alors j’aurais dû avoir peur. Cette nuit de solitude sous la voûte étoilée a été extraordinaire. J’ai éprouvé le sentiment de l’absolu et avec, la certitude qu’un ordre, une intelligence, veille sur nous et que dans cet ordre, j’ai été créé, voulu. Et puis la même phrase occupait toutes mes pensées « tout est justifié ». Le désert, lieu de l’absence est le lieu de la présence.

La foule vient vers Jean , inverse de l’expression «  prêcher dans le désert ». Jean se situe lui-même dans la lignée des prophètes d’Israel, dans une histoire. Ce faisant, il situe Jésus dans cette même histoire comme aboutissement. Il s’agit aussi, comme prophète de remettre le peuple dans le droit chemin.

On est frappé par l’insistance sur le vêtement et le régime de Jean . Appel à nous questionner sur notre mode de vie dans la mesure où nous voulons nous- mêmes, en tant qu’apprentis- chrétiens ( Monod ) nous situer dans cette histoire et annoncer un monde nouveau. Quid des ripailles de Noël ?  Cf. Théodore Monod au désert.

 

Le maitre-mot du discours de Jean est la conversion ( metanoia ). Changement de mentalité et de comportement. Jean s’adresse aux pharisiens et aux saduccéens . C’est-à-dire aux religieux qui appliquent la loi. Pour le religieux, la relation à Dieu passe par l’application de la Loi et des rites sans référence à la relation humaine. Jen ne s’adresse-t-il pas aux «  bons chrétiens »que nous sommes.

L’appartenance à Israël n’est pas la condition d’une relation à Dieu…. Et l’appartenance à une Eglise ? Ce qui compte pour lui, c’est le comportement » Produisez du fruit ». Ce n’est pas l’appartenance qui compte mais le fruit de nos actes envers autrui.

Théologie des œuvres ??.

Il y a une différence frappante entre le texte de Jeanet celui d’Esaïe sur «  celui qui vient ».

Jean, est dans le genre apocalyptique (dévoilement) rude et sévère. Cf Mt 25 «  tout arbre qui ne porte pas de fruit va être coupé et jeté au feu ».  « Il va nettoyer son aire la balle il la brulera au feu qui ne s’éteint jamais ».

Contradiction avec la vision pacifique d’Esaïe : «  il ne jugera pas sur l’apparence » « il jugera les faibles avec justice »  « Le loup habitera avec l’agneau » «  il ne se fera ni mal ni destruction sur la montagne sainte ». un monde nouveau est annoncé avec un jugement tout en douceur.

L’image apocalyptique que véhicule jean semble ne voir le salut que dans le « faire » qui détermine les sauvés et les maudits.. Mais les  « fruits » sont produits par le changement d’esprit ( metanoia ). Le jugement ne passe pas par le tri entre bons et méchants mais entre ce qui en nous détermine le comportement.

Jean baptise d’eau, symbole de vie et de mort, pas de vie sans eau mais aussi facteur de mort : symbole de résurrection. Baptème = lavage

Mais Jean annonce un autre baptême, celui de l’Esprit, ( pneuma agios ) = souffle, souffle de vie qui fait sortir et avancer ( cf. apôtres à la Pentecôte ). Vent.

Ce baptème pousse vers les autres, vers les «  fruits », il est foi qui nous fait sortir de notre moi pour entrer dans l’Amour ( agape ) actif.

Des siècles après, Jean nous remet dans « l’avènement », c’est-à-dire dans la mémoire, dans l’histoire du Christ né, mort et ressuscité. Jésus est déjà là, pourvu que nous l’acceptions et nous convertissions que nous changions notre souffle de vie.

Mais l’avent n’est pas une vaine commémoration, pas plus que Noël. Ces deux moments sont là pour nous faire avancer sachant que Jésus est notre futur, que l’amour de Dieu est notre futur, et que nous devons porter ses fruits en étant ses témoins.

 

Le message de Jean pris comme annonce de l’avènement mais aussi vision eschatologique comme celle d’Esaïe, nous recentre sur l’essentiel de notre foi.

«  La perspective eschatologique ( fin des temps ) n’est pas un aspect du christianisme ( ).le christianisme est tout entier eschatologique, il est espérance, perspective et orientation en avant et donc aussi départ et changement du présent ». J. Moltmann.

Le monde nouveau annoncé est là pour nous faire avancer, l’oublier, c’est péché. Le désespoir est péché.

«  Voilà le péché qui menace le croyant plus profondément : ce qui l’accuse ce n’est pas le mal qu’il fait, mais le bien qu’il omet de faire. Ce ne sont pas ses méfaits, mais ses négligences. Elles l’accusent de manquer d’espérance ». J. Moltmann.

Dans ce monde cruel dans lequel nous vivons, ce monde chargé de désespérance, l’avent et Noël, par le message de Jean, par la force de l’esprit, nous invite, si nous voulons être vraiment chrétiens, prophètes du monde qui vient, à changer notre regard, dire l’espérance qui est devant nous, et produire de ces fruits  d’Amour.

 

Jean-Pierre Pairou    04/12/16