11/12/2016 prédication Charles Klagba

 Prédication du 11 décembre 2016

3e dimanche de l'Avent


 

Textes bibliques :

Esaïe 35 : 1-10

Matthieu 11 : 2-11

 

 

MESSAGE

 

Frères et sœurs, le temps de l’Avent c’est le temps de l’espérance, de l’attente d’un évènement mais aussi d’un avènement : le Messie vient. Dieu nous rejoint dans notre humanité pour nous rendre espoir et nous faire entrer dans sa liberté.

 

Dieu vient instaurer une nouvelle cité, établir son règne parmi les humains, par sa présence manifeste dans ce monde appelé à devenir son temple, comme lieu de rassemblement et d’unité de toute l’humanité dans sa diversité.

 

Pour ce troisième dimanche de l’Avent, Dieu a une bonne nouvelle pour toi et pour moi.

Dans la nouvelle cité de Dieu, les premières places seront occupées par les pauvres et les humbles, contrairement à ce que nous connaissons dans les sociétés établies par les humains. Dans cette nouvelle cité qui vient, les premiers seront ceux qui humblement ont le souci de l’autre. La nouvelle cité est ouverte à ceux qui la plupart du temps, ont connu des épreuves et se sont reconstruits.

Ce Messie qui vient a un amour inconditionnel pour les pauvres, les petits, les exclus.

C'est cette bonne nouvelle que nous retrouvons dans les passages bibliques de ce dimanche. Ils nous révèlent que Dieu vient à nous pour nous délivrer du mal.

Le prophète Esaïe, dans le premier passage, est porteur de ce message de l’émergence du nouvel ordre.

Dans un contexte où tout semble s’écrouler autour de nous, le prophète Esaïe nous convie à nous joindre à la caravane de l’espérance, comme des lettres vivantes écrites sur le modèle de Dieu. Esaïe s'adresse à un peuple totalement accablé et épuisé par les 40 années d'exil qu'il vient de vivre. Et voilà ce prophète qui lui annonce un avenir radieux. Le désert va refleurir. Et surtout, les prisonniers et les exilés vont pouvoir revenir chez eux. Ce retour est présenté comme un "ouragan de joie". Dieu ne peut accepter la situation tragique de ces populations. Il intervient pour les guérir et les sauver. C'est un prélude à ce qui se passera plus tard. Par sa mort et sa résurrection, le Christ ouvrira le chemin de la vraie vie à toute l'humanité. La terre entière et ses habitants seront transformés. Le prophète Esaïe dit en substance : « le désert et le terrain sec se réjouiront, la plaine aride exprimera sa joie …On verra la gloire de l’Eternel, la splendeur de notre Dieu… Fortifiez les mains affaiblies et affermissez les genoux flageolants ! Dites à ceux qui ont le cœur battant :’’fortifiez-vous, n’ayez pas peur ! Voici votre Dieu vient. »

Frères et sœurs, cette prophétie d’Esaïe est une bonne nouvelle ! C’est un appel à la joie, à l’allégresse. Une promesse de bonheur et de vie, une promesse de libération et de renouvellement de la création. Dieu promet un acte créateur par lequel il veut rendre à sa création son vrai visage.

Il vient transformer nos déserts, nos lieux arides, sans vie, sans eau, en lieux de vie, en lieu fertiles. Dieu promet un acte créateur par lequel il veut recréer l’être humain, le transformer, le renouveler en profondeur. Un acte créateur par lequel il veut nous guérir de nos infirmités, nous libérer de notre aveuglement, de notre surdité, de notre paralysie, de notre mutisme. Dieu annonce qu’il vient nous sauver; il annonce un nouvel Exode, une libération de notre captivité. Il nous annonce que nous allons revenir sur notre terre, dans la terre promise, la terre de notre cœur. Cette patrie de notre cœur, de notre être, de laquelle nous nous sommes éloignés, que nous avons perdue. Dieu annonce que même dans nos déserts, nos lieux desséchés, nos lieux de souffrance, il y a un chemin de vie possible. Il vient transformer nos chemins obscurs en voie sacrée. Ce chemin est possible, car Dieu lui-même l’emprunte avec nous. Jésus Christ est venu vivre la même vie que nous, pour nous montrer le chemin.

Dieu offre un monde nouveau, un monde où les forts veillent sur les plus fragiles. Un monde où les déserts naturels et humains reculent au point de disparaître, laissant place aux prairies et aux chants de fêtes.

Esaïe est concret : la libération du Dieu sauveur n’est pas seulement spirituelle, intérieure, ou symbolique. Elle s’enracine jusque dans notre chair et notre histoire humaine.

Frères et sœurs, c’est le rêve porté par le prophète qu’il partage avec nous. La venue du Messie, Jésus nous apporte la plus grande joie. Celle d’un nouveau départ avec DIEU. Cette joie est notre force. Elle est notre motivation, dans ce monde difficile et complexe. Il n’y a pas de destin, pas de fatalité. Les plus défavorisés, les plus démunis, les plus à plaindre seront comblés de joie, nous dit le prophète Esaïe. L’avènement du Messie est le début du processus de reconstruction. Nous pouvons y croire.

Cependant, c’est vrai, frères et sœurs, la réalité implacable nous réveille en sursaut. Notre monde est gravement malade. On pourrait, à juste titre, se demander, frères et sœurs, à quoi bon rêver à demain puisque aujourd’hui ressemble tellement à hier, que l’humain reste désespérément humain et que Dieu semble être muet ou semble nous avoir abandonnés ? Cette interrogation légitime nous amène à Jean Baptiste dans l’Evangile de ce jour.

Jean est bien notre frère en humanité. Il est capable du plus grand : reconnaître le Sauveur, il le dit publiquement, même si ensuite il éprouve des doutes. Jean-Baptiste est en prison pour avoir reproché à Hérode une inconduite selon la loi. Depuis sa prison, il entend parler de Jésus. Il fait poser cette question à Jésus : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? ». Jean-Baptiste n’est plus tout à fait sûr que Jésus soit le Sauveur annoncé. Pourtant, quelques mois auparavant, lors du baptême de Jésus, Jean-Baptiste avait été convaincu que c’était bien le Messie.

Jésus s’est éloigné vers le nord en Galilée. Jean-Baptiste a entendu dire que Jésus s’entourait de personnes pas très recommandables, qu’il n’était pas un ascète. Il mange et boit comme tout le monde alors que Jean-Baptiste menait une vie très austère.

« Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre? » En d’autres mots, est-ce vraiment par toi que Dieu répond à nos attentes, ou bien faut-il se tourner ailleurs?

Frères et sœurs, si on sent le besoin de poser la question, c’est que Jésus ne correspond pas au messie qu’on s’était imaginé.

Comme cela nous ressemble! Pensez à tous ces messies recherchés pour régler nos crises personnelles, sociales, économiques, politiques et écologiques ! On espère toujours que ces messies nous arracheront aux difficultés, épreuves de la vie.

Si Dieu nous avait laissé le soin de dessiner le messie, nous en aurions fait quelqu’un qui aurait mis soudainement fin à ce monde de misère et aurait enfin créé l’humanité parfaite. Rien de cela ne s’est passé. Voilà un constat qui peut être un obstacle à la foi.

Jean-Baptiste se met à douter et s’adresse à Jésus pour qu’il l’éclaire. Jésus ne répond pas par oui ou par non à la question de Jean-Baptiste mais il cite un passage de l’écriture qui parle du Messie et que Jean-Baptiste connaît. C’est le passage du prophète Esaïe, notre premier texte.

« Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et voyez. » Jésus accueille pleinement la question de Jean-Baptiste, sans y répondre formellement. Il conduit seulement Jean à reconsidérer les signes que lui, Jésus, a posés. Jésus appelle donc Jean-Baptiste à persévérer dans la foi, à accepter son style (celui de Jésus), à quitter la représentation du sauveur qu’il s’est bâtie, lui Jean, à considérer de manière neuve le monde à partir de l’action et de la parole de Jésus, à basculer alors dans cette nouveauté.

Jésus est bien celui qui se tient à proximité de chaque humanité pour donner à cette humanité le pouvoir de croître par elle-même, en relation avec l’autre. Jésus suscite des questionnements en nous, il ne se substitue jamais à nous. Il est l’incarnation de ce nouveau règne qui donne à chacun, à chacune de vivre dans la foi pleinement. Il donne ainsi passage pour que tous et toutes, chacun et chacune puissent entrer de plain-pied dans la nouveauté du Règne, le Règne de Dieu.

Écoutons, frères et sœurs, ce que Jésus dit aux disciples de Jean-Baptiste, que je paraphrase comme ceci : « Je suis allé au devant des gens qui avaient toutes sortes d’infirmités ou étaient des exclus. J’en ai guéri plusieurs, mais surtout je leur ai donné de l’espoir et ils se sont remis en marche. »

Fondamentalement, Jésus ne dit pas que l’infirmité, la violence ou la pauvreté n’existeront plus, mais il dit qu’un souffle l’habite qui lui permet de contribuer à la transformation des autres pour qu’ils trouvent la vie là où ils sont. Ce souffle est en chacun et en chacune de nous.

Quand il dit que le plus petit dans le Royaume est plus grand que Jean-Baptiste, il dit simplement que tout être croyant dispose de par sa foi, d’une puissance transformatrice qu’aucun grand de ce monde ne peut égaler. C’est pourquoi Jean-Baptiste, en entendant ces paroles de la part de Jésus, va tout de suite comprendre que Jésus est bien le Messie.

Retenons l’attitude de Jean-Baptiste dans le doute : il ne se laisse pas abattre, il ne demande pas conseil aux disciples, il leur demande de s’adresser directement à Jésus, qui l’éclaire de sa parole. Jésus non seulement n’est pas choqué par le doute de Jean Baptiste mais fait son éloge. Voilà, frères et sœurs, qui peut nous rassurer devant nos propres doutes.

Frères et sœurs, le récit de ce dimanche pose une question : quel messie attendons-nous?

Si nous savons nous ouvrir à la réalité telle qu’elle est, avec ce qu’elle peut comporter de blessures pour tous nos rêves, nous aurons fait un premier pas. Le deuxième pas sera de nous ouvrir au souffle de Dieu qui nous habite, et qui a habité Jésus, pour faire naître la vie au moment où nous aurons la tentation de ne rien faire et de nous abandonner à la fatalité. C’est ce que signifie l’incarnation, Dieu avec nous. C’est ce type de Messie que propose Jésus et que nous célébrons à Noël. Est-ce également notre messie?

Frères et sœurs, restons dans la confiance même si nous ne pouvons pas tout comprendre. Si notre cœur est prêt, Dieu y agira.

Enfin, je voudrais terminer en reprenant pour nous ces paroles fortes du prophète : « Fortifiez les mains affaiblies et affermissez les genoux fléchissants ! Dites à ceux qui ont le cœur battant : fortifiez-vous, n’ayez pas peur ! Voici votre Dieu. Il viendra lui-même vous sauver »

Amen !

 

Charles KLAGBA