27/09/2020 prédication Michel Pujol

PREDICATION DU DIMANCHE 27 SEPTEMBRE 2020

 

Jésus est sur le chemin de Jérusalem, il a accompli un miracle qui en fait n’est pas vraiment un miracle d’amour mais plutôt un signe du jugement qui ne va pas épargner le peuple. C’est l’épisode du figuier stérile.

 

Il arrive à Jérusalem et se rend au temple. Là les responsables du peuple viennent contester son autorité. Ils lui ont adressé une question non pas pour connaître la vérité mais pour lui tendre un piège : « par quelle autorité fais-tu ces choses ? ».

 

Alors, comme parmi le peuple beaucoup ou du moins un grand nombre croyait en lui, il leur propose la parabole des deux fils pour leur montrer que les hommes du peuple, qui ont toujours mené une vie séculière valent mieux que les prêtres qui ont toujours fait profession de servir Dieu. Que les hommes du peuple finissent quelquefois par se repentir et par revenir à Dieu, alors que les prêtres confirmés dans leur impénitence ne cessent de pécher contre Dieu.

 

La parabole met en scène deux fils et l’on comprend immédiatement que Jésus va proposer deux options et surtout qu’il va demander à ses détracteurs de choisir et de prendre leur responsabilité. Jamais Jésus ne nous enferme dans un raisonnement où l’issue est déjà tracée d’avance. Jamais il ne nous oblige ou nous contraint par une seule et inique décision. On peut penser qu’ils sont pris ainsi à leur propre piège. 

 

Les controverses, Jésus s’en est acquitté bien des fois, surtout avec les scribes et les pharisiens. Ces derniers, les théologiens de l’époque, étudiaient la Torah, ils l’interprétaient ; alors ils étaient des adversaires impitoyables de Jésus.

 

La question principale pour ces théologiens réside dans l’autorité de Jésus et de savoir qui représente correctement la volonté divine. Qui représente vraiment à cette époque le peuple d’Israël ?

 

Au travers de ce texte, il importe d’affirmer l’autorité de Jésus, et son lien particulier avec le Dieu d’Israël. Il importe aussi de faire comprendre que le peuple d’Israël doit impérativement montrer sa fidélité au Dieu d’Israël. Et comment doit-il faire ? Eh, bien il doit changer radicalement, il doit se repentir, il doit ainsi témoigner de sa fidélité au Dieu d’Israël. La repentance est donc bien le thème de cette parabole et il n’est pas nouveau ; pensez aux prophètes, pensez à l’exode, pensez au désert.

 

Dans ce passage, le fils qui dit « je ne veux pas » est pris de remords et accomplit le travail demandé. Ce fils représente ceux qui savent reconnaître leur péché et qui se mettent à la suite du Christ. Dans le contexte de cette histoire, ce texte fait opposition aux radicaux que sont les scribes et pharisiens, et qui ne reconnaissent jamais leur erreur de jugement.

 

Car, il vaut mieux être celui qui se rend compte qu’il a fait une erreur et qui cherche à se corriger, plutôt que celui qui est enfermé dans ses certitudes et qui ne trouvera jamais une solution. Celui qui pense qu’il a toujours raison, met un point final à tout, à une discussion, à une action.

 

 Ce qui est sûr, c’est que les compagnons de Jésus s’identifient à ce fils qui dit non, plutôt qu’à ceux qui disent toujours oui sans pour autant lier leur parole aux actes.

 

Et vous, à qui vous identifiez-vous ?

 

 Personnellement j’ai toujours été celui qui dit non. Je ne sais pas si l’on dit naturellement et plus facilement non que oui, mais je retrouve encore aujourd’hui cette habitude, et pas que chez moi.

 

Dire non, c’est aussi peut-être se protéger d’une décision hâtive que l’on peut regretter. Dire non, c’est le temps de la réflexion, c’est le temps de se positionner, c’est un temps que l’on met à profit pour soi. J’ai souvent dit non, mais j’ai toujours fait ce qui m’était demandé. Dire non, c’est aussi affirmer un certain caractère, un trait de sa personnalité. Dire non, c’est au début râler et maugréer.

 

Avais-je vraiment du remords ? Je ne pense pas que dans ma jeunesse ma conscience fût à ce point aiguisée pour peser le pour et le contre, mais par contre un certain sens des choses, sans pour autant dire un sens du devoir m’a toujours poussé à exécuter ce qui m’était demandé. Et le non remplace souvent le oui.

 

Aujourd’hui, j’ai changé. Je dis toujours oui. Mais ce oui, il demande après, du temps, il est en fait moins rapide que le non. Ce oui, en fait il est là pour ne pas nous compliquer la vie. Un oui, c’est une tacite approbation. Un non, c’est le début d’un questionnement, c’est le début d’un conflit. C’est aussi une façon de se positionner, d’avoir ou de montrer sa personnalité. Et, puis en disant non, on se sent fort, on a de l’aplomb, et finalement des certitudes, qui à notre tour nous enferment. On est sûr de soi mais c’est aussi un peu dangereux ce genre de positionnement.

 

Le oui est quand même plus logique que le non. Dire oui, c’est ne pas savoir dire non, mais le plus important réside dans le questionnement que cela impose car il faut savoir ensuite comment faire pour agir et résoudre ce qui vous a été demandé.

 

C’est exactement ce qui se passe dans cette histoire. Montrer que ceux qui disent oui, ceux qui semblent logiques dans leur choix, ne font pas en fait le bon choix. C’est montrer que le judaïsme n’était plus le bon choix, mais qu’au contraire, il fallait désormais se tourner vers cette nouvelle communauté qui incarnait un véritable renouveau, à la suite de Jean-Baptiste et de Jésus.

 

Qu’en est-il aujourd’hui dans notre société de ceux qui disent « ok, je suis d’accord, ça marche » et qui se retrouvent après incapable d’assumer leurs promesses ?

 

Cette petite histoire n’est pas très éloignée de ce que nous vivons. Des promesses souvent sans lendemain, et surtout de plus en plus de belles paroles qui s’envolent.

 

Mais avons-nous le choix ? Comme le père, faut-il choisir entre les deux fils ? La parabole ne nous le dit pas exactement, elle ne nous dit pas si le père préfère celui qui a dit oui, ou celui qui a dit non. Et tant mieux. Elle nous dit celui-ci a fait la volonté de son père. Et l’histoire n’a pas d’autre dénouement ? Je vous pose la question ?

 

Bien sûr cette histoire est bien plus importante qu’elle n’y paraît. Elle marque définitivement l’avènement du christianisme, elle marque la supériorité de la tradition chrétienne sur le judaïsme, elle nous dit qu’à la suite de Jean et de Jésus, le peuple élu ce sont les chrétiens. Elle nous dit au travers de ce récit des deux fils, qu’il y a un fils qui fait des choses justes et qu’il y a un fils qui se fourvoie et qui sera condamné. C’est l’histoire d’un jugement.

 

Comment pourrait-on croire que l’évangile puisse à ce point ne pas être une bonne nouvelle pour tous ? Vous ne croyez pas que la bonne nouvelle, elle est pour tous ?

 

Vous ne pensez pas que nous pourrions interpréter ce oui et ce non d’une autre façon ?

 

Celui qui dit oui et qui abandonne, vous ne croyez pas qu’il nous faille l’aider ? Peut-être il dit oui mais il a peur d’affronter la réalité des choses qu’il n’a pas envie de faire. On pourrait lui permettre de dire non. On pourrait se dire que le remords et la repentance ça peut exister. On pourrait dire à celui qui a dit oui, que de dire non, ce n’est pas forcement entrer en conflit, que c’est simplement le fait de n’être pas d’accord.

 

Partager ses ressentiments, ses émotions, ses colères, ses frustrations, c’est aussi avoir une relation de confiance et pas forcément une relation basée uniquement sur la colère.

 

En faisant le parallèle avec la marche au désert, vous croyez que le peuple n’a pas râlé durant son errance. Ce n’est pas pour ça que cela a entaché sa relation avec Dieu. Sa relation avec Dieu n’était pas basée sur la colère mais sur la fidélité. Fidélité de notre engagement et fidélité de la promesse de Dieu. Dieu même si nous lui disons non, nous avons toujours la possibilité de revenir vers lui, nous avons toujours la possibilité de nous dire qu’il nous faut retourner à lui qu’il nous faut changer nos idées.

 

Cette repentance ne pourrait-on pas l’assimiler à une conversion ? Conversion bien sûr du premier fils qui a refusé d’abord d’obéir à son père et qui ensuite se repend. A l’inverse de son frère qui fait semblant d’accepter, avec docilité, mais qui ensuite n’en fait qu’à sa tête. Ceux de la Première Alliance ne font en fait pas vraiment la volonté de Dieu, malgré toutes leurs déclarations, leurs confessions de foi, leurs prières et leur participation aux liturgies du temple.

 

Quel outrage ensuite pour eux, quand Jésus leur déclare que les publicains et les prostituées les précèderont dans le royaume des cieux. C’est un peu de provocation !

 

Alors quelle est la bonne nouvelle de cette histoire. Vous croyez que c’est notre attitude qui parfois même désarçonne, on râle et on est content de son comportement négatif, mais en fin de compte on plie quand même la table, on va sortir les poubelles, on va passer l’aspirateur ou on va étendre le linge.

 

Vous croyez que l’on peut dire non ? Eh bien oui !

 

Protester, refuser, se mettre en colère, n’entache en rien notre relation avec Dieu. Ce n’est pas pour ça qu’il va rompre sa relation avec nous. Ce non va nous pousser au contraire, va nous inciter presque nous demander à nous surpasser pour agir et faire ce que nous ne voulions pas faire ou du moins ce qui nous paraissait impossible à faire.

 

Cela ne vous est jamais arrivé ?

 

Cette attitude qui vous a demandé des efforts, c’est Dieu qui vous a interdit de vous décourager, c’est Dieu lui-même qui ne vous a pas contraint mais qui vous as aidé. Et Dieu ici c’est le parent qui ne choisit pas entre les deux fils et qui ne se lasse pas de nos faiblesses, de nos refus parfois ou de nos limites, mais au contraire c’est celui qui nous aime tels que nous sommes, qui nous apprend à discerner le oui du non, qui apprend aussi à celui qui dit oui, que le non peut-être aussi salutaire.

 

AMEN