07/11/2021 prédicaion Philippe PERRENOUD

7 novembre 2021   Carcassonne (avec présence du « souvenir français »)     

                                                                                                                         

 

            Dans quelques jours, ce sera le 11 novembre, fête de l’armistice, d'une paix retrouvée ; bien précaire... comme toute paix, d'ailleurs... Comme l'actualité de la semaine, avec ces 2 assassinats dans un quartier de la ville.

Et également : à quel prix ?...

Posons-nous alors la question de l'horreur de la mort, et de la guerre...

 

            Les chrétiens ont l'espérance de la résurrection. C'est immense ; un sujet, un thème immense...

A aborder une autre fois

                 d'autres fois, donc...

 

            Aujourd'hui, je voudrais d'abord prendre le temps de la question : comment parler de « Dieu » face à l'horreur ; les horreurs de la guerre en particulier.

           

            En effet, avant d'avoir une réponse, avant de partir d'un passage de la Bible, comme nous le faisons normalement, dans notre démarche qui consiste à recevoir un témoignage de Vie, dans la Bible, à recevoir aujourd'hui, à comprendre...

…  justement : comment la comprendre ?... Et même : comment comprendre tout simplement, même la vie, le sens de la vie, la raison d'être de la vie...

Ceci, en particulier, face à toute l'horreur de la guerre...

 

            Ce sont des questions qui ont hanté tant et tant de personnes, et d'années, et jusqu'à aujourd'hui toujours... Cela est malheureusement toujours d'actualité...

 

            Il faut alors prendre le temps de se les poser, ces questions... avec des attitudes différentes : comment parler de « Dieu » ? Et Dieu dans tout cela ??

 

            Quelques traces, en me basant sur des correspondances de soldats, de 14-18 en particulier :

–    Dieu est appelé à l'aide, bien sûr, au secours au milieu de l'épreuve, des dangers : quoi de plus normal... Ceci à ne pas juger trop vite comme de la superstition, car nous le faisons tous . Et des appels à l'aide existent aussi bien sûr dans la Bible... :  Elle nous offre alors son aide, au sens du réconfort, de la confiance, vidés comme nous pouvons l'être de toute sécurités illusoires. Mais les hommes sont parfois aussi vidés d'espérance...

–    ou alors des témoignages de soldats sur les déluges d'obus. Seraient-ce un nouveau déluge, une punition de Dieu ?? Nouvelle destruction par Dieu ? Ou Apocalypse ? Et même une image de l'enfer : au sens courant du terme et au sens d'abandon, d'un lieu où Dieu n'est pas, où il est absent... Bref, des concentrés de toutes les souffrances et détresses du monde... Cette humanité déchirée, et même déchiquetée... anéantie, qui est comparée  aux ossements desséchée d’Ézéchiel et autres passages de désolations...

–    Mais le vocabulaire de la colère laisse aussi la place à des représentations toutes autres, audacieuses : juste après guerre de 14-18, un artiste a représenté le Christ en croix avec un masque à gaz : c'est le Christ qui est aussi massacré ; c'est le Christ qui a aussi connu tout cela ; et ce courage d'affronter les réalités les plus difficiles...

Ou, autres représentations christiques : Giono voit le Christ dans le prisonnier allemand ; sans oublier bien sûr les fraternisations, entre tranchées, et dans les tranchés (ce qui a favorisé l'essor de l’œcuménisme !).

–    la foi est liée au courage, au courage de vivre et parfois de mourir, de ne pas fuir...

–    courage aussi dans la conscience révoltée ; notre foi n'est jamais résignation.

–    Et alors, sans doute d'autant plus, parce que notre foi n'est pas une simple acceptation d'un destin ou d'une destinée, une révolte face au silence de Dieu...

 

            Dans cet abîme sans fond qu'est la guerre, on peut perdre la vie ; on peut aussi perdre son âme... perdre toute humanité (comme cela a été aussi rapporté pour tant d'autres situations, au cinéma par exemple ; à propos de 14-18, mais aussi de façon si forte à propos de 39-45, du Vietnam, de la guerre d'Algérie, etc...)

 

            Alors, Où est Dieu ?...  ? Effectivement, peut-être n'est-il pas là ?... Mais peut-être aussi vient-il au milieu de toutes ces horreurs ?...

 

            Comment ? La Bible nous donne ce résumé, dans la 1ère lettre de Jean, au chapitre 4, le verset 8 :  Dieu est Amour...

 

            Cela peut sembler peu, face à l'horreur.. Cela peut être immense... Comment le comprendre ce verset  Dieu est Amour  Comment le vivre ?

 

C'est un résumé très fort de notre foi...

–    Parce qu'il tient en trois mots !

–    Et aussi parce que cela peut sembler illusoire et démenti par l'horreur... Cela ne l'est pas quand cet Amour amène ce Dieu à assumer notre condition humaine, et les conditions de notre monde... en allant jusqu'à la croix...

 

             Où est Dieu ? entend-on souvent, et à juste titre... et avons-ns déjà entendu dans le Ps 42 que nous avons chanté tout à l'heure... 

Si Dieu est Amour , il est comme ce Père qui souffre pour ses enfants, qui souffre d’autant plus de ne pas les voir prendre le chemin qu'il espérait, qu'il espère toujours, pour eux... construire ce monde tel qu'il nous l'a confié

            L'Amour que l'on a pour quelqu'un d'autre ne le préserve malheureusement pas du danger, de la maladie, et l'épreuve ; à tous niveaux, y compris (peut-être surtout) les dangers relationnels ; l'Amour respecte les différences, l'altérité.

L'Amour est basé sur l'altérité... avec ce que cela suppose de liberté de l'autre ; et de rejoindre l'autre...

 

            Oui, comme toute la Présence en Jésus-Christ, Dieu nous rejoint, jusque dans les coins, les fonds les plus sombres... C'est lui qui est non seulement en croix (avec un masque à gaz ?, ou sans ; agonisant... comme l'humanité peut agoniser quand elle est déchirée...) ; mais des déchirures qu'il veut réparer ; une humanité à qui il redonne vie, qu'il ressuscite... qu'il nous appelle à recoudre...

            Toute sa Puissance est dans l'Amour ; sa « Toute-Puissance », c'est l'Amour… Toute sa puissance est dans l'Amour.

 

            Tel est le visage, la réalité de Dieu que Jésus est venu nous révéler. Tant d'autres suppositions religieuses et autres superstitions, manipulations (si nombreuses...) ou totalitarisme n'ont fait que renforcer le sentiment d'absurde...

           

            L'Amour, n'est-ce pas ce qui fait justement sortir de l'absurde,

donne sens,

donne vie, y compris avec ce que cela à de mystérieux ; comme nécessairement avec l'Amour ;

comme l'Amour lui-même... est mystérieux.

Mais il engage,

amène donc aussi au courage... à lutter parfois... à résister... 

 

            Des hommes (et des femmes ) ont dû ensuite parfois reprendre même les armes, pour permettre la vie : peu d'années malheureusement après la « Grande guerre », comme face au nazisme, ou jusqu'à aujourd'hui face à d'autres totalitarismes...

 

            Et pour nous ici, aujourd'hui ? toujours le courage d'être, de vivre, parfois de lutter... surtout d'être fidèles, en particulier par/pour une foi qui est au-delà de nos limites humaines, mais qui se propose, se vit, se partage... dans nos quotidiens aussi...

 

            Plus quotidiennement, ici aujourd'hui : des différences qui existent toujours (religieusement, et sans doute surtout culturellement, socialement) qui restent, d'héritages de l'histoire, des fossés même caduques, des tranchées mentales ; comme entre catholiques et protestants ? Ce n'est plus le cas entre Eglises, mais reste dans bien des mentalités, perceptions.

Entre français et étrangers ? C'est aussi dans des esprits, dans quelques esprits... Le plus important est un Esprit de fraternité qui nous est donné... Et qui permet non seulement de vivre, d'apprendre à vivre ensemble, de prendre ce long cheminement de l'humanité commune et de la différence...

            Non seulement tout cela, mais alors servir, partager, entre nous et pour d'autres... comme pour d'autres victimes de l'histoire, réfugiés ; et d'autres pistes de vie, pour vivre l'humanité à ressusciter...

 

            Amen